Les outils utilisés pour commettre de graves crimes internationaux évoluent constamment - des balles, des bombes, les réseaux médias sociaux et peut-être maintenant l'intelligence artificielle. Alors que les États et d'autres acteurs ont de plus en plus recours à des opérations dans le cyberespace, ce nouveau moyen de diplomatie et de guerre, en pleine expansion, peut être détourné pour commettre ou faciliter des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité, un génocide, et même l'agression d'un État contre un autre.
Alors que le paysage qui nous entoure évolue, la justice pénale internationale doit elle aussi s'adapter. Bien que le Statut de Rome (traité international qui a créé la CPI en 1998) ne contienne pas de dispositions spécifiques consacrées aux cybercrimes, ceux-ci entrent dans le champ d'application de nombreux crimes internationauxn tels qu'ils sont déjà définis. Le Comité international de la Croix-Rouge a souligné que les cyberattaques doivent respecter les principes cardinaux de distinction et de proportionnalité, et ne doivent être dirigées que vers des cibles militaires.
De nombreux États s'accordent à dire que le cyber espace ne doit pas être à l'abri de toute réglementation, et que le droit international y a un rôle essentiel à jouer. Karim A.A. Khan, procureur à la Cour pénale internationale, estime que la loi doit agir pour ceux qui sont les plus vulnérables - Les lignes de front ne sont pas seulement physiques, mais aussi numériques. Elles ont la capacité d'infliger des dommages et de créer des souffrances comparables aux raisons mêmes pour lesquelles la CPI a été fondée.
La cyber-guerre n'est pas abstraite. Au contraire, elle peut avoir un impact profond sur la vie des civils. Les tentatives visant à impacter des infrastructures critiques telles que les installations médicales ou les systèmes de contrôle de production d'énergie peuvent avoir des conséquences immédiates pour beaucoup, en particulier les plus vulnérables. Par conséquent, Karim A.A. Khan indique que dans le cadre de ses enquêtes, le bureau du procureur de la CPI recueillera et examinera les preuves de ces agissements.
Les cyber-opérations sont parfois utilisées dans le cadre d'une stratégie dite "hybride" ou "zone grise". Ces stratégies visent à exploiter l'ambiguïté et à opérer dans une zone difficile à définir ; entre la guerre et la paix, le légal et l'illégal, les auteurs étant souvent cachés derrière des acteurs intermédiaires. Ce phénomène nécessite une réponse de l'ensemble de la société, rassemblant des fonctions et des capacités distinctes pour agir de manière coordonnée. Au niveau international, la compétence de la CPI - clairement définie et complémentaire aux juridictions plus larges des États - peut servir pour apporter une réponse collective.
En particulier, en tant que centre d'un système de justice internationale dans lequel les États, la société civile et les organisations internationales jouent chacun leur rôle, la CPI peut apporter plusieurs contributions. Par ses propres procédures visant à garantir la responsabilité juridique, la CPI peut dissuader les contrevenants. Ces procédures peuvent également aider à atténuer l'ambiguïté des stratégies hybrides en renforçant le droit applicable et en déterminant la vérité de manière fiable et proéminente. Le Bureau du procureur peut également jouer un rôle de soutien ou de coordination, non seulement en enquêtant en vue de poursuites devant la CPI, mais aussi en soutenant les États et d'autres organisations.
À tous égards, la coopération est essentielle. Il est indispensable que la CPI établisse et renforce des partenariats non seulement avec les États mais aussi avec les entreprises. era à l'élaboration d'un document de politique par le Bureau.
L'intensité et la fréquence croissantes des cyber-opérations soulignent également l'importance de développer et d'améliorer les pratiques opérationnelles de la CPI. Cela inclut de garantir que la CPI est correctement défendue contre les cyber-opérations. La désinformation, la destruction, la modification des données et la divulgation d'informations confidentielles peuvent entraver l'administration de la justice à la CPI et, en tant que telles, constituer des crimes relevant de la juridiction de la CPI qui pourraient faire l'objet d'enquêtes et de poursuites.
Même des visionnaires tels qu'Albert Einstein sont réputés avoir craint que la technologie ne finisse par dépasser notre humanité.Sans aucun doute, nous serons mis à l'épreuve. Mais grâce à nos efforts communs - et surtout la conviction que nous pouvons mobiliser le droit sur ces nouvelles lignes de front pour rendre justice - nous pourrions collectivement garantir la création d'un monde plus humain. La CPI jouera son rôle, maintenant et pour les années à venir.
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